Novembre 2021, n° 17
Peut-on déplacer une église ?
Au XIe siècle les maîtres bâtisseurs élevaient l’église de Saint Valéry sur la côte d’Albâtre au bord de la Manche. Ce site est aujourd’hui situé sur la commune de Varengeville-sur-Mer, dans le département de Seine-Maritime (76) en Normandie.
À cette époque les maîtres bâtisseurs savaient reconnaître les lieux adaptés pour l’implantation de tout bâtiment religieux. Ils connaissaient notamment les conditions indispensables à l’édification d’une église. Le fait que celle-ci soit à cet emplacement exact et non pas à tout autre endroit du site, que cela soit seulement à quelques mètres, voire quelques dizaines ou centaines de mètres a son importance.
L’édification d’un tel bâtiment passait nécessairement par le savoir-faire des tracés régulateurs. C’est à partir de ces plans qu’émergent l’aspect de l’église tant dans ses dimensions que ses proportions. L’orientation quant à elle, très souvent, est donnée par la mécanique céleste. Cette géométrie des tracés n’est pas hasardeuse, improvisée, au bon vouloir de l’homme de l’art. Elle est imposée par le contexte. Elle vient s’appuyer sur les caractéristiques naturelles de la géographie ainsi que celles du sol et du sous-sol. Devant une telle reconnaissance des éléments naturels et de leurs effets sur le vivant, il est possible de dire que le lieu suggère l’architecture et la place de l’humain.
Mais voilà, pendant tous ces siècles, jusqu’à nos jours, le ressac de la mer a fait son œuvre en érodant la côte. L’église initialement située à environ 400 mètres de la falaise abrupte, se trouve aujourd’hui située à quelques dizaines de mètres de celle-ci. Elle devrait être engloutie par les flots d’ici 30 à 50 ans, sur les coups de boutoirs des vagues venant s’écraser sur la falaise et grignoter la roche.
Face à cette menace, il est peut-être possible de déplacer l’église. Si ce déplacement permettait de conserver le bâtiment en tant que trésor du patrimoine local, celui-ci deviendrait qu’un simple monument « historique » de pierres dénué de sens, duquel serait hotté son esprit, que certains appellent âme, mais aussi et surtout privé de sa fonctionnalité originelle. Il se transformerait en pâle souvenir de la communion d’un bâtiment sacré dans son écrin de nature.
Sauf…, sauf, s’il est fait appel à une ou des personnes capables de reconnaître toutes les caractéristiques ayant présidé au choix du lieu initial et d’en rechercher quasiment les mêmes, du moins les plus proches possible, pour le nouvel emplacement, afin de conserver l’intention première des maîtres bâtisseurs et de leur savoir-faire. Pour cela, il est possible de faire appel à un géobiologue !
Bernard OLIFIRENKO
Géobiologue,
Saint-Ferréol, le 9 novembre 2021.